dimanche, juillet 30, 2006

Pour une diplomatie économique au Sénégal


Dans cette édition, j’ai choisi de tenir compte des critiques que certains de mes lecteurs ont formulées, à savoir que le Blog est trop accentué sur la politique . Mais avouez que demander au Secrétaire général de la Fédération PDS du Canada d’aborder moins de questions politiques, ne relève pas du bon sens. Les uns m’ont demandé de publier ma thèse ou des extraits de documents que j’ai produits ça et là lors de conférences ou de séminaires et les autres d’exposer les raisons de mon soutien à Michael Ignatieff, cet éminent professeur à Harvard, candidat à la course au leadership du Parti libéral du Canada. Pour mon ami Michael, je le ferai, mais au moment que je jugerais opportun.
Je tiens d’abord à souligner que j’ai ouvert cet espace pour uniquement donner mon opinion sur des questions de mon choix. Ensuite produire ici des documents d’une teneur non accessible au plus commun de mes lecteurs, ne m’agrée pas.
Vous me permettrez, cependant, de faire d’une pierre deux coups : m’écarter, cette fois, de ce que ces critiques qualifient de sujets "politiques" pour me pencher sur un sujet, rarement abordé sur la toile : La diplomatie comme outil de développement économique.
La mondialisation a instauré une sorte de prédominance de l’économie sur la politique. Cette prédominance s’est traduite par l’avènement d’une nouvelle économie caractérisée, non seulement, par une interdépendance plus dense entre économies des différents pays, mais aussi par un accroissement et un décloisonnement des marchés. Dans ce contexte, la compétitivité devient l’enjeu principal. Cette compétitivité se fait entre les entreprises, les villes, les régions et les États. Elle est devenue assimilable à un jeu à somme nulle où l’on gagne ce que l’autre perd et vice-et-versa. Aussi les États cherchent-ils à faire preuve d’innovation dans leur démarche pour être compétitifs. C’est dans ce cadre que certains pays essayent de mettre à contribution leur diplomatie. C’est le cas, notamment du Sénégal. Ce pays en développement a une économie caractérisé par une balance commerciale très déficitaire avec des exportations couvrant à peine 40% des importations. Cependant son taux de croissance moyen pour les cinq dernières années est d’environ 5% et dépend principalement de l’agriculture qui demeure encore, pour l’essentiel, soumise aux aléas climatiques.
Les investissements privés sont encore faibles mais le pays occupe une place privilégiée concernant le flux d’investissements étrangers directs dans la sous région. Il dépend beaucoup de l’aide publique au développement. Le Président de la République, Abdoulaye Wade, dès son accession à la magistrature suprême, a décidé d’une nouvelle politique étrangère à même d’aider le pays à faire face aux défis du nouveau contexte international.
Selon le ministère des affaires étrangères : " Le but ultime de cette nouvelle politique étrangère du Sénégal est la relance de la croissance économique et le développement, la promotion de l’amitié, de la paix et la concorde entre les peuples ainsi que le renforcement de la coopération internationale ".
Cette nouvelle politique étrangère a forcé la définition d’une nouvelle diplomatie dont l’objectif est de traduire en actions concrètes les nouvelles priorités du pays. Il s’agit à cet égard de " promouvoir une diplomatie économique, d’attrait des investissements, et donc véritablement au service du développement, de consolider les cercles d’amitié et de solidarité, de revaloriser les axes de coopération Nord-Sud et Sud-Sud ".
Le Président de la République s’est attelé à doter son pays d’une diplomatie de développement capable de relever les défis de la globalisation.
Pour ce faire, il a défini une nouvelle politique étrangère basée sur trois axes fondamentaux :
-L’ancrage panafricaniste;
-L’insertion plus marquée dans l’économie mondiale;
-La consolidation des axes traditionnels et l’exploration de nouveaux axes de coopération internationale.
Le premier axe s’inscrit conformément à une disposition de la nouvelle constitution de 2001 stipulant que le Sénégal était prêt à céder toute ou partie de sa souveraineté au profit de l’unité africaine. Le pays entend ainsi jouer un rôle de premier plan dans la réalisation de cette unité.
Le deuxième axe souligne l’importance que le pays accorde au développement économique dans le contexte de la mondialisation. C’est ainsi que le pays a fourni au Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) ses piliers les plus essentiels que sont les infrastructures, l’éducation, l’agriculture, la santé et le choix de l’entreprise privée comme locomotive du renouveau économique de l’Afrique.
Enfin, le troisième axe réaffirme la consolidations des axes traditionnelles de coopération avec ses partenaires privilégiées, la France, les États-Unis, le Canada et les pays pétroliers du golfe et se donne des perspectives encore plus larges pour un re-dimensionnement de la coopération internationale, sans oublier la politique traditionnelle de bon voisinage avec les pays limitrophes.
Il a mis en avant une nouvelle politique diplomatique axée sur la promotion des investissements et des exportations et ce, pour mieux tirer avantages des délocalisations, de l’économie du savoir, du commerce et des finances. Cependant, mettre la diplomatie au service du développement suppose une sérieuse remise en question du mode fonctionnement classique des représentations diplomatiques et de la mentalité des diplomates. Cette remise en question passera par une véritable " réingénierie de la diplomatie " et ne manquera pas de charrier un important changement, pour ne pas dire une onde de chambardement diplomatique, si elle n’était pas bien pensée et bien exécutée. C’est dire que toute la problématique de cette nouvelle orientation s’articulera inévitablement autour des questions suivantes : Le Sénégal est –il en mesure d’utiliser la diplomatie pour accroître sa compétitivité et donner un coup de fouet à sa croissance économique ?
Quels seront les enjeux de cette diplomatie économique ?
Le Sénégal dispose t-il de ressources humaines et financières pour mettre en œuvre une diplomatie économique?
Quelles modes de gestion de changement mettre en œuvre pour vaincre le conservatisme des diplomates ?
Or, depuis l’énoncé de la nouvelle politique étrangère, il n’existe pas , à notre connaissance, beaucoup réflexions sérieuses sur la mise en place ou sur le contenu de la diplomatie économique. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé dans cette édition de mon blog de contribuer à la réflexion sur la diplomatie d’un Sénégal aux portes de l’émergence.
L’opinion publique sénégalaise, à l’image de celle de beaucoup d’autres pays, observe le monde des diplomates avec distance. Elle considère les diplomates comme des privilégiés qui sont envoyés à l’étranger et dont le train de vie obère le budget du pays. Elle s’interroge sur l’utilité réel des diplomates et sur leur rôle qui semble superfétatoire. C’est dire donc que les diplomates n’ont pas bonne presse. C’est ce qu’avait d’ailleurs compris l’ancien régime, qui, à la moindre secousse des finances publiques, sabrait dans le budget du Ministère des Affaires étrangères. Le régime issu des élections du 19 mars 2000, semble faire le pari que le pays a plus que jamais besoin de son appareil diplomatique pour s’insérer dans la dynamique de l’économie mondiale.
Mais avant d’aller plus loin, permettez moi de m’appesantir sur l’approche théorique de la diplomatie économique de façon générale, avant d’aborder la diplomatie sénégalaise proprement dite à travers sa mission, son fonctionnement et la place de choix qu’elle confère à notre jeune nation.
APPROCHE THÉORIQUE DE LA DIPLOMATIE ÉCONOMIQUE
Je n’ai pas ici la prétention de dresser un cadre conceptuel, mais d’en dresser, du moins, un contour qui s’articulera autour des écoles de pensée, des conditions ayant présidées à la nouvelle émergence de la diplomatie économiques, sa place dans les relations internationales, ses objectifs, ses acteurs, ses lieux de prédilections et de l’expérience en la matière dans certains pays. Mais auparavant, nous allons essayer de définir la diplomatie économique.
Définition de la diplomatie économique
La diplomatie économique est un terme générique qui désigne le volet économique de la diplomatie.
La diplomatie étant l’ensemble des moyens mis en œuvre par un État, dans le cadre de sa politique étrangère, principalement à travers la représentation, la négociation et l’entretien de relations bilatérales ou multilatérales, la diplomatie économique, quant à elle, peut se définir comme l’utilisation de l’appareil diplomatique en tant qu’instrument au service de la compétitivité nationale et internationale d’un pays, de sa croissance économique et de son développement ou de sa puissance économique.
Il ressort de cette définition que c’est une diplomatie qui vise à servir l’économie et à renforcer l’entreprise et qui se sert de l’économie comme matière.
Partant du constat que c’est la recherche d’un résultat économique qui caractérise la diplomatie économique nonobstant les moyens utilisés pour y parvenir, Guy Carron De La Carrière (1998), la définit comme la recherche d’objectifs économiques par des moyens diplomatiques, qu’ils s’appuient ou non sur des instruments économiques pour y parvenir.
Dans ce contexte, le ministère des affaires étrangères devient le centre de coordination et de relais de toutes les initiatives et actions internationales de l’État.
Place de la diplomatie économique dans les relations internationales
L’élément économie a été, de tout temps, important dans l’action diplomatique. La sécurité des approvisionnements, la route des Indes, les traités de commerce et de navigation, les foires du Moyen-Âge, les empires coloniaux, la recherche de zones d’influence et la recherche de garanties pour la sécurité des entreprises et le respect des engagements financiers sont autant d’éléments qui, jadis, ont été au cœur des préoccupations diplomatiques. C’est dire que la diplomatie économique n’est pas née d’hier. Même si les objectifs et les méthodes ne sont plus pareille, l’économie est encore, aujourd’hui, très déterminante dans les relations internationales. Elle est devenue la pierre angulaire de la majeure partie des rencontres internationales notamment le G8, le FMI, la Banque Mondiale, l’OCDE, le NEPAD, Sommets annuels de Davos et l’OMC.
Qui plus est, les organisations économiques internationales s’intéressent de plus en plus à la gouvernance économique des États. Elles inspirent ou dictent parfois même, l’agenda de la politique économique dans certains pays en développement.
En outre, avant la dislocation du bloc soviétique, les structures des relations commerciales se construisaient autour des alliances militaires. Aujourd’hui, tout se passe comme si elles étaient principalement à base économique. Dans cette même ordre d’idées, nous pouvons rappeler que la naissance de l’union européenne remontre à la communauté du charbon et de l’acier, puis au marché commun. C’est ultérieurement que sont venu s’y greffer les dimensions de politique étrangère, de défense ou de sécurité. Le G7 également à débuté à Rambouillet en France en 1975 sur une discussion sur l’avenir du Système monétaire. Ce n’est que plus tard que son ordre du jour a fait place à des questions politiques. Ainsi, les intérêts économiques constituent une variable qui pèse lourdement sur les relations internationales et ce, sous l’impulsion du processus de libéralisation et de déréglementation des échanges entre nations. Cette libéralisation des échanges et des mouvements des capitaux est en train de s’imposer comme une tendance lourde de la politique économique internationale. En effet la croissance mondiale des échanges de marchandises et services ainsi que des investissements extérieurs des entreprises et des flux financiers est incomparablement plus forte que celle de la production mondiale.
Cette importance grandissante de l’économie dans les relations internationales a poussé à une nouvelle recrudescence de la diplomatie économique.
Nouvelle émergence de la diplomatie économique
Du fait de l’interdépendance croissante des économies née de la mondialisation, l’équilibre économique est devenue une question d’intérêt commun. Il n’y a plus de crises économiques ou financières localisées. La moindre secousse en Asie ou en Amérique Latine affecte Tokyo, Bay Street, Wall Street, Londres ou Francfort. La demande extérieure influe sur la croissance. Les disparités de développement sont aussi génératrices d’instabilités commerciales, sans compter le niveau des liquidités internationales qui a des répercussions sur l’inflation ou la solvabilité. L’ingérence économique est en train de s’ériger en paradigme diplomatique et économique car chaque État veille à ce que les politiques économiques menées à l’extérieur de ses frontières soient compatibles avec celle qu’il mène. La frontière entre l’intérieur et l’extérieur ne cesse s’amenuiser. C’est dire que les États se sentent désormais affectés par la santé économique de leurs partenaires. Le bon fonctionnement de l’économie libérale devient un sujet de préoccupation de la communauté internationale. De même, les déréglementations ou dérégulations, la suppressions des obstacles à la concurrence, les règles de passations des marchés ou d’appels d’offres , le désarment douanier et tarifaire, les mesures non tarifaires et la liberté des échanges sont devenus des enjeux éminemment diplomatiques. Tout se passe comme si aucune activité politique internationale ne pouvait se dispenser d’une dimension économique à organiser, négocier ou évaluer. C’est sans doute, ce qui a fait dire à Guy Carron De La Carrière (1998) que :
" Il n’y a pas de politique culturelle sans vision de l’économie de la culture et sans le support des grands groupes multimédia ; il n’y a pas de politique de défense et d’alliances militaires sans prise en compte des industries d’armement et sans comptabilité des matériels ; il n’y a pas de politique scientifique sans une coopération internationale, c’est-à-dire sans financements conjoints de recherches ou publications à rayonnement international ".
Il s’y ajoute que le caractère multipolaire de l’économie rend encore plus nécessaire la concertation et la négociation entre États (politique commerciale, politique des transports, politique monétaire, politique de concurrence, politique d’attrait des investissement, politique d’aides aux entreprises, etc.). L’objet des échanges s’est agrandi et s’est diversifié : le flux des investissements, des services, des biens immatériels est venu s’ajouter à celui des marchandises. Ce foisonnement des échanges est devenu une pièce essentielle des économies, de sorte qu’il est nécessaire que les États s’entendent sur leurs modalités de fonctionnement. Les entreprises se référent plus à la concurrence et aux marchés qu’à leur pays d’origine. Leurs activités reposent maintenant sur des collaborations, des contributions et des fournitures qui transcendent les frontières. Ce qui entraîne des conséquences tant au niveau de l’appui aux entreprises, qu’au niveau des politiques économiques extérieures. L’intérêt économique des entreprises fait l’objet d’interventions et de pressions diplomatiques, soit pour l’ouverture de débouchés, soit en vertu d’une stratégie nationale d’exportation et d’investissement.
En un mot, l’économie est devenue en soi un objet de diplomatie et non un accessoire . Ce qui fait que le multilatéralisme est en train de s’épanouir dans la sphère économique. Il engendre des méthodes et activités diplomatiques nouvelles qui vont au-delà du cercle des diplomates traditionnels puisse que l’international pénètre de plus en plus tous les aspects de la vie des entreprises et des administrations publiques. Aujourd’hui, nous assistons, aussi bien dans les grandes puissances économiques et financières que dans les pays dits émergents, à l’envole de la diplomatie économique. Cette dernière fait l’objet de plusieurs écoles de pensées que j’ai volontairement classées en trois, suite à des recoupements. Cependant, je passerais sous silence l’école classique et ses héritiers pour ne retenir que l’école du libre marché et l’école néo-diplomatique.
École du libre marché
Pour les adeptes du libre marché, l’intervention de l’État dans la mise en œuvre de la diplomatie économique n’est pas nécessaire. L’État doit, plutôt, se concentrer sur ses missions régaliennes. C’est la vision dominante chez les ultra-libéraux et les institutions de Bretton Woods. Selon cette école de pensée, les États devraient se désengager du fonctionnement de l’économie, ouvrir leur marché, assainir leur environnement fiscal, mettre en œuvre la privatisation des entreprises publiques et des politiques permettant le rétablissement des équilibres macro-économiques. Cette voie est celle de la bonne gouvernance. Elle permet d’atteindre tous les objectifs recherchés à travers la diplomatie économique dont la mise en œuvre ne serait plus, par conséquent, nécessaire. C’est la doctrine du " laissser-faire " et " du laisser-aller " dans le domaine de la diplomatie économique.
Ainsi, la libéralisation des marchés sera le cheval de bataille des auteurs du libre marché dont un des précurseurs, à mon avis, est Walras, même si les défenseurs de cette théorie restent encore cantonnés dans les institutions de Bretton Woods.
École néo-diplomatique
Selon les auteurs de l’école néo-diplomatique, la diplomatie doit servir l’économie. En d’autres termes, elle doit avoir pour finalité l’accroissement de la croissance économique et du développement. L’élargissement et l’accélération de la libéralisation des échanges mondiaux constituent des faits marquants de la nouvelle économie internationale qui a généré une interdépendance de plus en plus marquée entre les économies. Le nouveau contexte international force au renforcement de la fonction économique de la diplomatie. Ce contexte est caractérisé également par l’internationalisation croissante des entreprises, le renforcement du processus de mondialisation de la production et des échanges et une utilisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication qui croît à une vitesse fulgurante. Dans ce contexte, la diplomatie est appelée à ajuster ses fonctions économiques pour répondre aux besoins des opérateurs économiques. Elle doit aussi assurer le renouveau de ses anciennes missions relatives à la défense des intérêts économiques nationaux. Selon Guy Carron De la Carrière (1998), le chantre de cette école de pensée, nous sommes à l’ère post-diplomatie politique. Nous sommes entrée de plein pied dans l’ère du marché, de la diplomatie économique. Cette diplomatie négocie l’art d’exporter au-delà des frontières et d’importer aussi. C’est cette diplomatie qui s’active aux cotés des entreprises internationalisées et c’est également elle que l’on trouve à l’origine du G7 et de la construction européenne. C’est à elle que revient la lourde tâche d’ordonner et de gérer la globalisation de l’économie mondiale. C’est sans doute ce qui a fait dire à Christian Deblock (2002) que cette nouvelle diplomatie s’opère en étroite collaboration avec les milieux d’affaires et vise à établir des alliances, dont on attend trois choses :
Premièrement, permettre un meilleur déploiement des activités à l’étranger par un accès élargi et sécuritaire aux marchés. D’où la très grande portée des accords signés et leur extension à de nouveaux domaines, allant de l’investissement à la fiscalité en passant par les marchés publics, les normes administratives, les services, etc.
Deuxièmement, faciliter le règlement des différends commerciaux, mais également les problèmes d’intérêt commun comme la criminalité économique.
Troisièmement, créer des alliances plus larges pour favoriser une intégration plus en profondeur des économies concernées et ainsi permettre un meilleur positionnement sur les marchés internationaux et l’établissement de liens de complémentarité. Et Deblock (2002) d’ajouter que c’est cela qui est à la base du lancement de projets aussi ambitieux que le projet des Amériques, l’APEC ou le projet EuroMed. La prolifération de ces accords bilatéraux ou régionaux, dits de " seconde génération " est selon lui, l’un des aspects les plus visibles de cette nouvelle diplomatie. Ces accords touchent aussi bien les pays industrialisés que ceux en développement. Cette diplomatie économique multilatérale est parvenue à mettre autour de la même table, grandes puissances économiques et petits pays et à faire reconnaître le rôle régulateur des institutions internationales comme l’OMC. Les pays qui se tiennent à l’écart (Cuba et Corée du Nord) sont marginalisés.
En outre , certains chefs d’État sont aussi des adeptes de cette école de pensée. Ces chefs d’État ou de gouvernement privilégient, dans leurs déplacements, le volet économique. C’est le cas notamment du Premier ministre du Canada avec les célèbres missions " Team Canada ", des présidents de pays comme la France, les États-Unis et la Chine. Nous pouvons aussi, dans une certaine mesure, classer le Président Wade dans cette école. Ces décideurs politiques se déplacement presque toujours avec les hommes d’affaires de leur pays pour appuyer ceux-ci dans la concrétisation de certains contrats importants. C’est ainsi que le président Chirac a pu déclarer :
" Quand je vais à l’étranger, je n’ai aucun complexe. J’y vais pour vendre les produits français."
Par ailleurs, l’ensemble des dispositifs mis en place, pour gérer l’économie internationale, est impressionnant. Il est plus complet, mieux respecté et mieux sanctionné que dans n’importe quel autre domaine. Certes, il reste beaucoup encore à faire, mais même pour ceux qui sont insatisfaits des échanges internationaux, la demande est pour plus d’organisation et donc plus de diplomatie économique. Mais qu’en est-il des objectifs de cette dernière ?
Les objectifs de la diplomatie économique
Comme je l’ai énoncé précédemment, la diplomatie économique a pour objectifs principaux, l’accroissement de la compétitivité des entreprises et de l’État, la croissance économique et le développement. C’est la recherche de résultats économiques ou financiers qui la caractérise. Mais, il est certain qu’on ne peut éliminer de cette réflexion, les stratégies diplomatiques qui visent des finalités économiques pour en retirer des résultats politiques. La recherche d’objectifs économiques par des moyens diplomatiques, qu’ils s’appuient ou non sur des instruments économiques pour y parvenir, constitue la portée de base des actions de la diplomatie économique. À cet effet, elle doit s’occuper des situations globales et son principal objectif est l’organisation d’une croissance économique régulière. Toutefois, la distinction, entre objectifs politiques et objectifs économiques, est encore loin d’être définitivement tranchée.
Les objectifs secondaires de la diplomatie économique sont nombreuses. Nous pouvons en retenir : la recherche d’une information économique repensée par les diplomates, la négociation économique, financière et commerciale, la prospection économique et commerciale, la promotion des opportunités économiques nationales à l’étranger, l’attrait et la rétention des investissements directs étrangers, l’aiguillage des entreprises nationales et internationales, la libéralisation des échanges, la constitution de zones d’intérêts économiques, les partenariats économiques, les regroupements régionaux, approfondir l’ordre économique mondial et saisir les opportunités à chaque niveau.
Mais la mise en œuvre de ces objectifs requiert la présence des acteurs.
Les acteurs de la diplomatie économique
Les principaux acteurs de la diplomatie économique sont les États, les entreprises et les organisations économiques internationales.
Les États, à travers leur chef d’État ou de gouvernement et leurs diplomates sont des acteurs importants de la diplomatie économique. Mais chose paradoxale, les diplomates n’ont plus le monopole de la diplomatie. Dans beaucoup de pays les ministères dits économiques ou techniques ont encore la prééminence en ce qui concerne les questions internationales purement économiques ou financières. L’expansion et la variété des domaines touchés par les relations économiques internationales a conduit au pluralisme des intervenants comme les provinces, les régions, les villes, les agences de coopération internationale et les entreprises multinationales. Ces dernières étendent leur tentacules en dehors de leur pays d’origine et cherchent à saisir toutes les opportunités d’affaires qui servent leur vocation. Les pays et les entreprises ont des logiques tout à fait différents. Les premiers visent la croissance et le développement tandis que les seconds visent la rentabilité et la diminution des risques. Les États se doivent de prendre en considération ces deux logiques afin de concilier correctement les intérêts nationaux et les stratégies des firmes multinationales. Ils se servent des entreprises pour satisfaire leurs objectifs de gouvernabilité et les entreprises se servent d’eux pour satisfaire les attentes de leurs actionnaires. La diplomatie économique se soucie de l’ordre économique international et de la stabilité du système monétaire international. Ces objectifs sont poursuivis par les organisations économiques internationales. Parmi celles-ci, il y a les organisations de surveillance du SMI et de la gouvernance économique. Créé par la conférence de Bretton Woods de 1944, le système monétaire vise à trouver un mécanisme international pour éviter le retour des terribles conditions économiques après la deuxième guerre mondiale.
Les institutions de Bretton Woods assurent avec l’OCDE la gouvernance économique mondiale. En effet, créée en 1961 à Paris par les États-Unis et leurs alliés, la Convention de l’Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE) se fixe comme objectifs entre autres, de cordonner la politique économique des pays membres et de promouvoir le développement harmonieux et durable de l’économie mondiale.
Aussi, le G8 véritable laboratoire d’idées, contribue t-il beaucoup à l’élaboration du plan de mondialisation économique.
Dans le cadre de la mondialisation nous avons, à côté de l’OCDE, le Club de Rome qui essaie de trouver des solutions à la problématique mondiale, ensemble complexe de problèmes socio-économiques, technologiques, environnementaux, psychologiques et culturels.
L’OCDE travaille aussi avec la Chambre de Commerce International. Cette dernière comprend le Bureau International des Chambres de Commerce Nationales qui est un regroupement de plus de 7000 entreprises industrielles, commerciales et de services, dont des multinationales telles que General Motors , Hunday , Shell ,Nestle ,Toshiba, Toyota.
Ces organisations s’appuient sur des structures opérant au niveau mondial qui sont la Banque mondiale (BM), le Fonds Monétaire International (FMI) et l’Organisation Mondiale du Commerce(OMC).
La Banque mondiale est actuellement chargée, notamment, de fournir une assistance technique aux gouvernements et de promouvoir l’investissement privé en garantissant et en participant à des opérations privées. L’idée de créer une banque mondiale pour la reconstruction et le développement trouve son origine dans le constat que les marchés financiers se sont montrés réticents, pendant l’entre - deux guerres, à financer des projets d’investissements dans les pays en développement. Pour accomplir ses tâches, la Banque mondiale et ses filiales (AID, SFI) fonctionnent comme un établissement de crédit empruntant des ressources sur les marchés financiers qu’elle prête ensuite aux pays en développement.
Le FMI, est chargé de maintenir un fonctionnement harmonieux du système monétaire international. Le " code de conduite " que le Fonds devait faire respecter, visait, avant tout, à contribuer à l’expansion du commerce international jusqu’en 1973. Durant cette période, le FMI avait comme mission principale de garantir la stabilité des changes. Ainsi les pays membres s’engageaient à ne pas effectuer des dévaluations compétitives et de tout mettre en œuvre pour garantir la stabilité de leur monnaie.
La parité des monnaies des pays était déclarée officiellement. Elle devait être exprimée en or, mais en pratique elle était exprimée en dollars US.
Suite à la grave crise économique vers les années 1970, en Europe (Angleterre, France) et aux États-Unis, on assista à la disparition du régime de Bretton Woods, qui laissera le système monétaire sans règles fixes ; les monnaies deviennent flottantes.
Cette décision historique va modifier toute l’architecture financière et économique internationale notamment les échanges et l’investissement.
La généralisation des taux de change flottants et la possibilité d’avoir recours aux financements des marchés de capitaux, permettent aux pays industrialisés de se passer du FMI. De nouvelles structures parallèles de financement et de concertation, publiques et privées contournent le FMI. Celui-ci va devoir justifier son existence qui lui sera fournie rapidement par la crise de la dette des pays en voie de développement qui le met au cœur du dispositif international destiné à encourager la recherche de solutions .
À cotés des États, des entreprises et des organisations économiques internationales apparaissent d’autres acteurs qui essayent de prendre part, à leur manière, à la diplomatie économique. Il s’agit des organisations non gouvernementales internationales. Certaines de ces organisations se sont données une vocation alter-mondialiste, pour une autre mondialisation qui prenne en compte l’équité et la justice sociale.
Les lieux de prédilection de la diplomatie économique
La diplomatie économique a produit sa propre organisation. Elle se fait d’abord dans les organisations internationaux. Parmi celles-ci nous pouvons citer les organisations de Bretton Woods, l’OMC, l’OCDE, la CNUCED, etc.
Elle se fait ensuite dans les sommets. Réunissant des chefs d’États et de gouvernement autour des questions relevant de la diplomatie économique, ils sont devenus nombreux et fréquents. Les sommets du G8, les sommets des Amériques, les sommets UE-ACP, pour ne citer que ceux-là, sont connus du grand public.
Il y a également les foires commerciales, congrès, colloques et séminaires qui réunissent des décideurs publiques et privés. Nous pouvons citer, entre autres, le forum annuel de Davos organisé par le World Economic Forum et la Commission trilatérale Amérique du Nord, Europe et Japon travaillant pour une meilleur coordination des politiques économiques.
Articulation de la diplomatie économique dans quelques pays
La description de quelques expériences étrangères a pour simple objectif de relater comment différents pays ont pu s’organiser pour rendre efficace leur diplomatie économique. Il est vrai que toutes les formules dépendent du contexte national de chaque pays. Jetons un regard rapide sur l’expérience de pays comme la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni, les États-Unis, le Canada, le Japon et la Chine.
L’expérience française
En France l’exercice de la diplomatie économique est partagée entre le Ministère de l’économie et des finances (Bercy) et celui des Affaires étrangères (Quai d’Orsay). Bercy s’estime seul compétent pour l’ensemble de son secteur, surtout lorsqu’une dépense nouvelle est de près ou de loin en jeu, tandis que le Quai d’Orsay aspire à exercer un contrôle sur l’ensemble des relations internationales et sinon à les dominer, en tout cas à ne jamais être tenu à l’écart. Un équilibre délicat règle les relations entre les deux. Un partage subtil des tâches est mis en place. Mais, pour les affaires les plus importantes, c’est seulement l’Élysée ou Matignon qui fait la synthèse et arrête la position officielle. Il y a des liaisons, des consultations, des commentaires et des avis, mais il n’y a pas de copilotage des dossiers. La coordination n’est pas assurée de façon systématique.
Dans les ambassades françaises, il y a couramment deux pôles. Il existe presque partout un poste d'expansion économique (PEE), dirigé par le conseiller économique et commercial (parfois appelé ministre) dont le portefeuille comprend l'industrie, l’agriculture, les services, le commerce international et les questions économiques ainsi que toutes les affaires financières sont du ressort de la Direction des Relations Économiques Extérieures (DREE) du Ministère de l'Économie et des Finances dont il est issu. Dans une quinzaine de missions on trouve aussi, provenant de la direction du Trésor du même ministère, une Agence financière, dirigée par le ministre-conseiller en charge des affaires monétaires et financières ainsi que des analyses macro-économiques traitées à Paris par sa direction d'origine et dont la compétence est la plupart du temps régionale.
Enfin, dans six ambassades, PEE et Agences financières ont fusionné au sein d'une mission économique et financière.
Dans le système français, les 120 Postes d’expansion économique (PEE) et Agences financières et missions économiques et financières sont des services extérieurs à leur département ministériel et continuent à en faire partie tout en étant placés sous l'autorité de l'ambassadeur auquel il revient d'assurer la cohésion d’ensemble de la mission diplomatique dont il est le chef. Leur budget, leurs moyens matériels et leur personnel viennent de leur département d'origine même s'il s'y ajoute quelques éléments extérieurs (en provenance du ministère de l'Agriculture, du CFCE, et de la Banque de France, selon les cas).
En plus de ces organisations officielles, le privé est, dans certains cas, présent comme acteur de diplomatie économique via les chambres de commerce.
Pour leurs missions d'appui aux entreprises, les PEE accordent une place importante aux diplômés d'écoles commerciales ou de gestion et aux ingénieurs recrutés sur contrats à durée limitée ainsi qu'à des agents d'autres ministères ou, pour les questions agricoles, aux chargés de mission du CFCE.
L’expérience allemande
L’Allemagne présente le contraste entre la claire définition de quelques attributions et le flou qui entoure la coordination de la politique économique extérieure. Les questions macro-économiques, le G8 et les institutions financières internationales sont de la responsabilité du ministère des Finances et de l’Économie, chef de file incontesté de la diplomatie économique allemande.
Mis à part les services économiques de l’ambassade, l’Allemagne délègue l’appui aux entreprises à des organismes parapublics distincts des missions diplomatiques ou même à des structures privées. Elle renvoie l'accompagnement courant et commercial des entreprises au réseau des chambres de commerce à l'étranger (AFIK), dûment subventionné pour remplir cette mission d'intérêt général et les missions d'information à l'Office Fédéral d'Information sur le Commerce Extérieur (BFAI), lui aussi subventionné et dispose de correspondants à l'étranger. Juridiquement indépendants, ces réseaux n'ont aucun lien avec les ambassades qui n'interviennent en rien dans leur activité ni même dans leur programmation.
L’expérience du Royaume-Uni
Au Royaume-Uni, le Foreign Office s’intéresse de près aux affaires financières et monétaires. Il partage, à peu près, compétence et influence avec le Department of Trade and Industry (DTI) dont les compétences s’étendent au commerce extérieur, à l’industrie, à la concurrence, à l’énergie et aux assurances. Les véritables instances de décisions de la diplomatie économique sont les comités interministériels présidé par un membre du Cabinet Office. La concertation interministérielle est donc bien assurée.
La Grande-Bretagne a fait le choix d'une organisation centralisée, entièrement administrative, intégrée au DTI au sein duquel une direction générale, dénommée Trade Policy and Export Promotion, définit la politique commerciale internationale et dirige la promotion des exportations dont la mise en œuvre à l'étranger est entièrement confiée à des agents du Foreign Office. Ces derniers ne sont pas spécialisés dans les fonctions économiques mais ils sont fortement incités à en acquérir l'expérience puisque le passage par un poste commercial est exigé pour devenir ambassadeur.
Tout en étant pas responsable, le DTI participe à la gestion et à l'orientation des services commerciaux à l'étranger à travers un organisme mixte, le Joint Export Directorate qui relève des deux ministères. Il détache un nombre croissant de ses agents dans les services commerciaux des ambassades (dont, au demeurant, les trois quarts des effectifs sont recrutés localement).
L’expérience des Etats-Unis
Aux États-Unis, la place du Congrès est éminente puisque c’est lui qui détient constitutionnellement le pouvoir de régler le commerce avec les pays étrangers. Il a donc la maîtrise de la politique économique extérieure et la contrôle, étroitement, par son pouvoir d’investigation, son rôle dans les nominations et l’exercice de ses fonctions budgétaires. Les États, les associations, les ONG et autres groupes de pressions viennent parfois compliquer la prise de décisions. L’ensemble du processus donne une impression de lenteur, voire d’inertie à certains moments, mais lorsque la stratégie est arrêtée, elle est consensuelle et le rôle du Département d’État s’impose. Il dirige les négociations quelles que soient leur nature. Il relègue les autres départements ministériels dans un rôle de fournisseur de dossiers.
Les États-Unis ont, depuis quelques années, adopté un dispositif semblable à celui de la France pour les sections commerciales de leurs ambassades avec, toutefois, la différence que leur compétence se limite à l'appui aux entreprises et ne s'étend pas aux autres domaines de la diplomatie économique.
Ces entités sont placées sous la double autorité de l'ambassadeur et du Département du Commerce. Leur personnel provient de ce département ministériel sous réserve d'un fort recrutement local. Il s'y ajoute les bureaux du Foreign Agricultural Service chargé, par le Département de l'agriculture, d'assister les exportateurs de produits agricoles et forestiers.
L’expérience du Canada
Le Canada gère sa diplomatie économique, essentiellement à travers le ministère des Affaires étrangères et du commerce internationale.
Le réseaux des délégués commerciaux et les agents de politiques et économie, placés sous l’autorité de l’ambassadeur travaillent en parfaite harmonie sur les questions ayant trait à la diplomatie économique. Mais les décisions importantes sont prises au niveau du bureau du Premier Ministre. Parallèlement, le ministère de l’Économie et des Finances, l’ACDI, EDC et EEC interviennent aussi sur la scène internationale. Toutefois, la coordination est assurée par le MAECI.
L’expérience du Japon
Au Japon, la réalité de la diplomatie économique est centralisée par le puissant ministère de l’industrie et du commerce international (MITI). Véritable chef d’orchestre, le MITI assure la parfaite coordination. Ses agents sont répartis dans toutes les ambassades et lui font directement rapport.
Le ministère des affaires étrangères, la JCA et le ministère des finances jouent un rôle d’appoint.
L’expérience de la Chine
La Chine populaire est un champion de la centralisation de la diplomatie économique. Son ministères des Affaires Étrangères est la pièce maîtresse de son dispositif en la matière. Dans ses ambassades, se côtoient des expertises diverses allant des agents économiques et financiers, aux agents commerciaux jusqu’aux agents de l’intelligence commercial, économique, financier, industriel et militaire. L’Ambassadeur assure la coordination et signe tous les rapports adressés au ministère et au parti communiste.
Maintenant que nous avons fait connaissance avec la diplomatie économique, abordons à présent la diplomatie sénégalaise.

LA DIPLOMATIE SÉNÉGALAISE
Au Sénégal, la diplomatie est du " domaine réservé du Président de la République " qui en délègue la gestion quotidienne au Ministre des Affaires étrangères et de l’Union Africaine. C’est le Chef de l’État qui détermine la politique étrangère et les grandes orientations diplomatiques qui en découlent. Il nomme, par décret, tous les chefs de missions diplomatiques accrédités à l’étranger. Ces derniers sont chargés de la mise en œuvre des missions qu’il leur confie. Ainsi nous pouvons classer ces missions en trois (3) catégories : Les missions dites traditionnelles, la gestion des sénégalais de l’extérieur et la nouvelle mission.
Les missions traditionnelles issues de la Convention de Vienne sur les représentations diplomatiques sont de trois (3) ordres :
La représentation : C’est la première fonction de l’ambassadeur. Ce dernier représente le Président de la République, le gouvernement et chacun des ministres . En d’autres termes, il représente l’État du Sénégal auprès du pays accréditaire. Il doit assurer la promotion de la meilleure image possible du Sénégal et de ses ressortissants dans le pays d’accréditation.
Cependant cette fonction de représentation est de plus en plus affaiblie par le développement de contacts plus directs entre les autorités politiques du pays et leur homologues étrangers.
La négociation : Le Sénégal n’est pas une puissance économique, mais c’est une puissance diplomatique. Dakar est devenue incontournable sur toutes les questions ayant trait à l’Afrique. Le Sénégal est reconnu comme un pays de dialogue. Par conséquent cette mission est au cœur de la diplomatie sénégalaise. C’est ainsi qu’une part importante de l’activité diplomatique du pays est constituée de négociations sur des questions de paix, de sécurité, de solidarité et de coopération. Toutefois elle porte aujourd’hui sur des domaines de plus en plus élargies.
L’information : Les diplomates sénégalais doivent rechercher, traiter, analyser et transmettre au Ministères des Affaires étrangères et de l’Union Africaine, toute information qui pourrait directement ou indirectement intéresser le pays. Malgré le progrès des communications, la multiplication des sources d’information, l’instantanéité des événements, cette mission reste encore d’actualité car c’est de l’information hautement stratégique qui est transmise.
Les sénégalais de l’extérieur: Les diplomates doivent se préoccuper des intérêts nationaux en veillant sur des aspects tels que les déplacements de ressortissants sénégalais et leurs séjours à l’étranger, leur insertion, leur protection et la promotion de conditions d’intégration et d’épanouissement. Cependant, cette mission est délicate dans les pays où règne l’insécurité. Qui plus est, de nombreux sénégalais vivent dans l’illégalité à l’étranger.
Théoriquement, cette gestion est de la compétence du Ministère chargé des sénégalais de l’extérieur, mais en pratique, elle incombe à celui des Affaires étrangères par le biais de ses représentations diplomatiques et consulaires.
Plus de deux millions de sénégalais vivent à l’extérieur du pays selon les estimations officielles. Cette forte communauté est à organiser et à gérer. L’État a mis sur pied le Conseil Supérieur des Sénégalais de l’Extérieur pour l’assister à cet effet. Cependant je continue à m’interroger sur l’utilité pratique de cette structure.
L’Union africaine : La politique étrangère sénégalaise repose sur une foi inébranlable dans l’intégration africaine. Le but ultime de la politique africaine du pays c’est la réalisation de l’Union Africaine. C’est pourquoi la diplomatie du pays fait de la promotion de l’Unité africaine une des ses préoccupations majeures. La défense et la promotion des intérêts du pays doivent aller de pair avec celle de l’Afrique. Elle travaille dans plusieurs instances internationales de concert avec les africains pour harmoniser les positions et défendre une position commune au continent. Mais cette promotion passe par le renforcement des relations de bons voisinage avec les pays limitrophes et ceux de la sous-région. Ces relations de bon voisinage sont élevées au rang de priorités.
Fonctionnement de la diplomatie sénégalaise
La diplomatie sénégalaise fonctionne à travers cinq (5) pôles : la Présidence de la République, le Ministère des Affaires étrangères, les ministères dits techniques, les ambassades, les hauts commissariats et les consulats.
La Présidence de la République : C’est le Président de la République et chef de l’État qui est le premier diplomate sénégalais. C’est lui détermine les grandes orientations, donne les impulsions nécessaires, nomme les chefs de missions diplomates. Il est entouré de quelques conseillers diplomatiques et du puissant service du Protocole d’État. Il effectue de nombreux voyages à l’extérieur. Chacune de ses visites est une occasion d’intenses activités diplomatiques. Il représente le pays dans les sommets réunissant les chefs d’États et de gouvernements.
Le Ministère des Affaires étrangères et de l’Union Africaine : À sa tête, il y a un ministre d’État. C’est le numéro deux de la diplomatie. Il veille à l’exécution des orientations et directives du Chef de l’État, prépare les sommets qui ont lieu au pays ou à l’étranger, fournit au gouvernement, à toute heure et sans délai, des informations fiables et à jour sur tout problème international. Il exerce une veille permanente sur les événements extérieurs. Le ministère trie et analyse les informations en provenance des représentations diplomatiques à l’intention des décideurs et du gouvernement. Il est organisé en plusieurs départements dont celui de l’Afrique, de l’Amérique du Nord, de l’Europe Occidental, du Proche et Moyen-Orient. Le Secrétaire général du ministère gère l’allocation des ressources dans les représentations diplomatiques et assure la coordination au sein même du Ministère. Plusieurs service lui sont rattachés dont la cellule des Études, de l’Analyse et de la Prévision. Cette cellule est chargée du suivi de l’actualité politique international et de l’élaboration de la situation y afférente, de l’analyse prospective et rétrospective de faits et événements susceptibles d’influer sur la politique étrangère. Elle est également en charge de l’exploitation de documents diplomatiques ou de fiches relatives à la politique extérieure du pays.
Le ministère mène une effort quotidien de coordination pour assurer l’indispensable cohérence de l’action extérieure. Il fonctionne comme un outil d’aide à la décision à tous les niveaux de la politique étrangère et de la diplomatie. Le Ministre des affaires étrangères, par délégation peut représenter le gouvernement dans certaines instances internationales. Il assiste le Chef de l’État à l’occasion de ses visites à l’international et à l’occasion de sommets.
Les Ministères dits techniques : Ce sont les Ministères de l’Économie et des Finances, du Commerce, de l’Industrie et de l’Artisanat, de l’Agriculture et de l’Hydraulique, des Petites et Moyennes Entreprises, de l’Environnement et celui de l’Économie maritime.
Chacun de ses ministères dispose de prérogatives sur la scène internationale sur ses domaines de compétences. Ils sont le leviers de la diplomatie multilatérale du pays notamment dans les institutions spécialisées de l’ONU et dans les institutions de Breton Woods. Le Ministère de l’Économie et des Finances, en particulier, dispose même de bureaux à l’étranger.
Les ambassades et hauts Commissariats: À la tête de ces représentations diplomatiques, il y a l’Ambassadeur ou le Haut commissaire. Dépositaire des pouvoirs de l’État, il est chargé, sous l’autorité du Ministre, de la mise en œuvre de la politique extérieure du pays. Le ministère l’assiste dans l’exercice de sa fonction. Il paraphe toutes les notes diplomatiques qui sont envoyées au Ministère par la valise diplomatique. Il dispose d’une équipe de diplomates appelée la chancellerie. L’ambassade comprend des services techniques de le nombre varie selon l’importance de la mission. Les postes les plus importants sont Paris, Washington, Rabat et Ryad.
Chaque ambassadeur dispose d’une résidence et d’une voiture de fonction. L’État met à sa disposition d’important moyens matériels et financiers. Les ressources humaines mises à la disposition de l’ambassade sont rémunérés en tenant compte du niveau de vie dans le pays accréditaire.
Les consulats généraux : Ils sont dirigés chacun par un consul. C’est un diplomate qui reçoit du Président de la République une commission consulaire. Il administre les sénégalais de sa circonscription et les protège des autorités locales en cas de crise ou de catastrophe. Il relaie l’ambassadeur dans ses missions, notamment en termes de représentation, d’information et de communication. Dans chacun des grands pays comme la France , L’Italie, l’Espagne, le Canada et les Etats-Unis, existent des consulats et une ambassade. Certains pays, sans ambassade, abritent seulement un consulat. Il existe aussi des consuls honoraires qui sont des bénévoles ressortissants du pays de séjour.
Rôle et place du Sénégal sur la scène internationale
Depuis son accession à la souveraineté en 1960, le Sénégal s’est toujours illustré comme un pays qui compte sur la scène diplomatique africaine, voire mondiale. De nombreux ressortissants ce pays occupent aujourd’hui des positions aussi stratégiques que celle de Directeur Général de la FAO, de Sous-secrétaire général des Nations Unies ou de Secrétaire Général l’OIF. Depuis 1960, le pays a participé à 25 missions de maintien de la paix sous l’égide des Nations Unies, de l’Union Africaine ou de la CEDEAO. Dans ce cadre, les troupes sénégalaises sont actuellement en mission en République Démocratique du Congo (RDC) et en Côte-d’Ivoire, notamment.
Les missions de l’ONU en RDC (MONUC) et en Côte-d’Ivoire (ONUCI) sont placées sous le commandement d’Officiers généraux sénégalais.
Dans le même ordre d’idées, le Président du Sénégal fait partie des initiateurs du Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique (NEPAD) et exerce un leadership remarqué au sein de l’Union Africaine. Il est invité à chaque réunion du G8 pour discuter des problèmes concernant l’Afrique. Le rayonnement diplomatique du pays est tel que, sa candidature, à titre membre permanent au sein du futur Conseil de Sécurité des Nations Unies, bénéfice d’un large soutien de la Communauté internationale.
Le pays, malgré sa petite taille et la faiblesse de ses moyens, dispose d’un réseau diplomatique assez dense, réparti sur les cinq continents.
LES ATOUTS DE LA DIPLOMATIE SÉNÉGALAISE :
Le Sénégal fait valoir de nombreux atouts sur la scène internationale : Le leadership de Chef de l’État, le professionnalisme de son armée qui opère sur plusieurs théâtres d’opérations sous l’égide des Nations-Unies, la présence de ses ressortissants dans la direction de certaines organisations internationales, la densité de son réseau diplomatique, le professionnalisme de ses diplomates, ses excellentes relations avec les pays du Nord et du Sud, la présence de bureaux de nombreuses agences spécialisées de l’ONU et de sièges d’organisations internationales à Dakar. Qui plus est, le pays est le " chouchou " des bailleurs des fonds aussi bien bilatéraux que multilatéraux. En matière de diplomatie africaine, tous les chemins mènent à Dakar, capitale de ce petit pays d’Afrique sub-saharienne. Le Sénégal est, donc, une puissance diplomatique.
Vitrine de la démocratie en Afrique, le Sénégal, qui est un des rares pays d’Afrique à n’avoir pas connu un coup d’État, a vécu une alternance politique exemplaire en 2000.
Le pays est présenté comme un modèle de démocratie et de stabilité politique et ce, malgré une rébellion qui sévit dans le sud du pays depuis vingt-deux-ans. Toutefois, ce conflit qualifié de résiduel par les Nations-Unies, est en voie de règlement définitif. La cérémonie mettant fin aux hostilités entre le gouvernement et le Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance (MFDC) a eu lieu en janvier 2005. À cet occasion le MFDC a renoncé définitivement à la lutte armée et a présenté ses excuses au peuple sénégalais.
Plusieurs réformes seront mises en œuvre par les autorités dans le but d’améliorer la situation économique du pays . Le Sénégal tout en maintenant ses liens avec ses partenaires traditionnels (UE , France, États-Unis, Canada, Japon, le Maroc et les pays pétroliers du golf) a entrepris la diversification et l’approfondissement de ses relations avec d’autres pays du globe comme la Chine et l’Inde.
LA NOUVELLE MISSION DE LA DIPLOMATIE SÉNÉGALAISE
La nouvelle politique étrangère, édictée par le chef de l’État, prône une diplomatie économique. Cette nouvelle mission doit devenir prioritaire à coté des missions précédemment citées. Elle nécessite que le Ministère des Affaires étrangères récupère des autres Départements ministériels la gestion et le suivi de toutes les questions de coopération bilatérales et multilatérales afin de lui conférer " l’autorité première de l’action gouvernementale à l’étranger ". Cette nouvelle mission met la diplomatie du pays au service de son économie et de son développement. Elle doit permettre au Sénégal de mettre tous les atouts de son coté pour tirer davantage profit de la mondialisation en cours.
Les autorités du pays, qui mènent une politique libérale, comptent beaucoup sur le secteur privé, en particulier sur le secteur privé international pour le développement du Sénégal.
À cet effet, sous l’impulsion du Président Abdoulaye Wade, le gouvernement mène actuellement une offensive de diplomatie économique pour vendre la destination Sénégal, en vue du développement du commerce et des investissements directs étrangers, dont l’objectif est d’insérer son pays dans l’économie mondiale et de le faire entrer dans l’émergence.
Cette volonté du gouvernement de renforcer la place du secteur privé dans la politique de développement du pays s’est traduite par la mise en place du dispositif incitatif à savoir l’assainissement de l’environnement réglementaire, l’adoption d’un nouveau code des investissement et la création de l’Agence de promotion des exportations (APIX), chargée de déterminer et de réaliser les programmes et actions nécessaires au développement de l’investissement privé.
Le pays peut donc utiliser ses atouts diplomatiques comme leviers d’une diplomatie économique pour financer son développement et promouvoir le secteur privé national et international.
Il s’agira de faire de cet appareil, un relais pour attirer les investissements directs étrangers et promouvoir le développement des exportations.
Il n’y a pratiquement pas d’entraves majeures à cet effet. Toutefois, il convient de tirer les leçons de l’échec des expériences timides et éphémères tentées aussi bien par le Ministère des Affaires étrangères que celui de l’Économie et des Finances pour donner plus d’atouts à une nouvelle diplomatique économique qui devra s’articuler autour des missions suivantes :
- Promouvoir l’économie et appuyer les ministères techniques dans la formation et le réseautage pour les négociations économiques, commerciales et financières internationales ;
- Aider les entreprises sénégalaises à trouver des marchés et leur fournir des informations commerciales pertinentes et utilisables ;
- Promouvoir le Sénégal comme site d’accueil des investissements directs étrangers ; -Intercepter depuis l’étranger les investisseurs et importateurs potentiels et leur fournir la documentation et les informations utiles.
- Analyser la situation économique et financière du pays considéré ainsi que les conditions d’accès à son marché ;
- Contribuer , par un travail de collecte et d’analyse de l’information, à la définition des positions du Sénégal au sein des instances multilatérales.
- Coordonner et faciliter des contacts de partenariat entre investisseurs ou importateurs potentiels et les entreprises sénégalaises,
- Rechercher des informations commerciales sur les marchés étrangers pour alimenter et mettre à jour une base de données informatisée.
- Mettre en réseau les agences de promotions économiques et les ministères techniques
- Transmettre les informations relatives à l’environnement des affaires au Sénégal
- Organiser des visites d’affaires dans les deux sens
- Participer aux foires et appuyer les agences de promotion économique dans les prospections
- Diffusion de documents utiles sur les avantages du pays (atouts et secteurs prioritaires),
- Suivi des contacts établis durant les voyages économiques du Président de la République.
La diplomatie économique nécessite une activité marketing soutenue. Elle exige des ressources financières supplémentaires. Ces ressources peuvent être trouvé à même les budgets de l’APIX, du CICES, du Ministère de l’économie et des finances et celui des Affaires étrangères. Sa mise en œuvre demande des compétences spécifiques et une logistique adéquate.
Elle exige également une bonne politique de communication et un environnement transparent qui permet l’implication de tous les acteurs. Elle exige non seulement des chefs de missions diplomatiques des qualités qui vont au-delà de leur formation traditionnelle. Ils devront être à la fois des diplomates, des gens d’affaires et des managers solides. La structuration des ambassades et des hauts commissariats doit être revue pour leur permettre de s’adapter aux exigences d’une diplomatie économique. Les autorités doivent préalablement procéder une analyse diagnostique complète des politiques diplomatique et de promotion des exportations.
En somme, la diplomatie économique, même si elle n’est pas une panacée, demeure un moyen efficace d’attrait des investissements et de promotion des exportations. Elle valorise davantage les missions diplomatiques qui ne seront plus perçues comme des maisons pour retraités ou protégés du régime.
Les ressources étant rares, toutes égales par ailleurs, le Sénégal devrait orienter sa diplomatie économique vers des pays à fort potentiels en termes de développement et de valeur ajoutée.
Je pense, dans le désordre, aux pays suivants :
Chine, Inde, Pakistan, USA, Canada, Mexique, Australie, Singapour, Malaisie, Brésil, Irlande, Norvège, Suède, Grande Bretagne, Suisse, Belgique, Hollande, Espagne, Italie, Afrique du Sud, Maroc, Tunisie, Maurice, Arabie Saoudite, Koweït, Katar, Émirats Arabes Unis, Iran, Israël.
Je rêve du jour où le Président Wade fera du Sénégal, un pays comme la Malaisie, qui grâce à la mise en œuvre d’une diplomatie économique intelligente, a pu drainer vers son territoire, plus de 3000 compagnies internationales provenant de plus de 50 pays.
Une chose est , cependant, certaine, le chef de l’État en a l’ambition et la volonté, mais dernière, ça ne décolle vraiment pas encore.
Pour ceux qui s’intéressent à la diplomatie économique et aux conditions de sa mise en œuvre, je vous réfère au document de travail que j’ai produit en 2003 lors du colloque international sur le management de la néo-diplomatie tenue à l’École nationale d’administration publique à Montréal.

Merci de votre fidélité et à la prochaine!
dsambou@sympatico.ca